3 h 15 – Bip, bip, bip! C’est l’heure ! Allez, debout! “Est-ce qu’il pleut?” Non. Ouf! Nos vêtements encore mouillés sécheront sur le vélo en roulant. C’est l’occasion de sortir nos pinces à linge.
Nous voici prêts à attaquer le copieux petit-déjeuner obtenu la veille après moultes tractations: pain-beurre-confitures-thermos-petits plats dans les grands, etc… “Voyons, ma Chère, vous prendrez bien un peu de thé, n’est ce pas?” – “Oui, volontiers, mon ami”. Enfin, plutôt une tasse d’eau chaude… car de thé, il n’y a point. C’était trop beau, ça cachait quelque chose tant de prévenance! Nous trempons allégrement nos tartines dans l’eau chaude.
“Je vais chercher la clé du garage à vélos” annonce Jean-Marie qui s’éclipse pendant que nous finissons nos préparatifs.
Le voilà rappliqué en quatrième vitesse : “Y’a pas de clé! Elle ne se trouve pas sur le tableau.” “Ah bon” ânonnent en choeur Alain et Marie, pas très bien réveillés. “Ben y’a plus qu’à attendre 7 heures” dit Alain, en se recouchant sans autre forme de procès.
Jean-Marie ne l’entend pas de cette oreille et part à l’assaut de la porte muni d’un couteau, maugréant contre ce bougre d’hôtelier-restaurateur à qui-on-a-pourtant-rappelé-douze-fois-que-nous-partions-à-4-heures-du-matin.
Marie et Alain vont quand même tour à tour constater la triste réalité. Nos vélos sont prisonniers de cette porte qui fait preuve de la plus évidente mauvaise volonté et refuse catégoriquement d’obtempérer à nos injonctions parfois musclées.
Jean-Marie est prêt à nous faire un remake de « Retenez-moi ou je fais un malheur! ». Il doit bien y avoir un moyen!
Oui! Mais c’est bien sur! Les gonds! Essayons à droite, pas concluant. Voyons à gauche. Alain retire sans difficulté les trois gonds et Sésame s’ouvre gentiment. Nos montures attendent sagement d’être libérées.
Il est 4 h 25. Nous prenons la direction de GIGNAC dans la douceur de la nuit sous un ciel plein d’étoiles, promesse d’une belle journée.
Nous quittons la RN109 à BEL AIR et prenons le CD102 pour contourner MONTPELLIER par le nord. Ceci pour répondre au souhait de Jean-Marie qui a un très mauvais souvenir de la traversée de cette ville lors de sa Diagonale en solitaire PERPIGNAN-STRASBOURG l’an passé.
Une charmante petite route, récemment refaite et encore interdite à la circulation, descend sur GRABELS. Le lever de soleil pare l’horizon d’une somptueuse lumière d’or.
Nous passons à l’est de LA PAILLADE et finissons après quelques hésitations à trouver la direction de VENDARGUES. Il est 6 h 30. Les automobilistes de tout poil commencent à assaillir les routes. A 7 h 45, pause petit-déjeuner à LUNEL. Pâtisserie à gauche, café à droite. Nous craquons encore une fois pour les brésiliens et repus, filons, cap sur la CAMARGUE, poussés par un léger vent de nord-ouest.
Les Costières du Gard, puis les rizières offrent peu de relief.
Voici VAUVERT (où se cacherait le Diable) et ST-GILLES (km 612) où nous contrôlons.
Râ darde ses rayons. Chacun y va de sa méthode pour s’en protéger. Jean-Marie s’enduit généreusement de crème solaire, tandis qu’Alain, plus pragmatique enfile la chemise à manches longues et enfonce le bob sur les oreilles.
ARLES, la romaine (km 628) – ses arènes, son théâtre antique – nous accueille avec ses rues ombragées animées par d’incessantes allées et venues. Nous sommes sous le charme et voilà, nous perdons notre chemin. Heureusement! Cela nous permet de rejoindre MAUSSANE-LES-ALPILLES en traversant les magnifiques paysages de la Crau. Le vert vif de ses terres fertiles contraste singulièrement avec le vert sombre des cyprès dont les hautes silhouettes graciles soulignent l’azur du ciel.
Nous perdons la notion du temps. Nous musardons, photographions, remplissons nos yeux émerveillés de mille couleurs. Il y a FONTVIEILLE, et le Moulin de Daudet, tout proches, les aqueducs romains, les cigales, les senteurs provençales, le rêve…
Pour un instant nous redevenons des enfants. Un canal d’irrigation sans doute bouché, inonde la route. Nous traversons joyeusement la mare qui s’est formée sur la chaussée. Un peu plus loin, Marie immortalise ses compagnons devant un troupeau de taurillons noirs.
Nous avons au moins 1 heure de retard et décidons de déjeuner à EYGUIERES et non à LA ROQUE comme prévu.
Après le repas, le départ est pénible. Il fait très chaud. Nous pédalons sans conviction.
Contrôle à LA ROQUE D’ANTHERON (km 692) non loin de la célèbre Abbaye de SILVACANE. Nous empruntons la vallée de la Durance jusqu’à PEYROLLES-EN-PROVENCE et faisons de fréquentes haltes aux fontaines pour nous rafraîchir. La route devient plus vallonnée. Le vent jusqu’alors favorable nous fait face. Les pinèdes ne nous offrent qu’une faible protection et nous pédalons dans les descentes.
A SALERNES, nous faisons quelques provisions, occasion pour Jean-Marie de s’asperger encore une fois d’eau fraîche.
Nous approchons enfin du terme de notre troisième étape, DRAGUIGNAN (km 806) est en vue. Jean-Luc BALP de l’ASPTT draguignanaise attend notre arrivée et nous guide vers le local de son club où nous passerons la nuit. Son épouse Josiane nous a préparé le repas qui s’impose: pissaladière et spaghettis à la Bolognaise. Nous dévorons installés à la terrasse de leur maison située au coeur de la ville ancienne, à deux pas de la Tour de l’Horloge. Notre hôte à l’accent chantant, prenant son épouse à témoin, n’en revient pas que l’on puisse avoir l’idée saugrenue d’entreprendre de pareilles randonnées.
A 23 h 10, nous nous couchons fourbus.